Entretien avec Léna Jeanne-Marquise
Interview de Léna Jeanne-Marquise pour les Trois Têtes
Bonjour Léna ! Il fait beau, il fait chaud, tu viens d’avoir ta licence d’art plastique à la Sorbonne et tu es aussi la troisième artiste des Trois Têtes. « Un Radeau dans mon Thé » vient clore la première saison de la collection Pupille… Parle-nous de cette expérience !
Ça faisait longtemps que j’avais pas fait d’illustrations pour un projet comme ça, donc c’était excitant de m’y remettre. C’était super de travailler avec vous – vu que vous êtes une petite équipe qui fonctionne bien. J’ai trouvé ça cool que vous laissiez autant de liberté à l’artiste.
Quels sont les thèmes que tu traites le plus souvent ? Est-ce que tu travailles par périodes ?
Depuis Estienne, j’ai essentiellement travaillé sur la famille. Les histoires familiales et les portraits, en utilisant beaucoup de symboliques, personnelles ou autres. Souvent j’intègre du végétal, mais plus comme un outil que comme un thème.
Il parle de quoi ton livre ?
Ça parle d’une fille qui s’ennuie et qui déprime pour rien dans son salon. Mais je ne voulais pas que ça reste déprimant alors j’ai fait une fin un peu comique. Au final tu te rends compte que tout va bien.
Tu veux faire quoi après ?
J’ai un peu du mal à m’imaginer loin. Pour l’instant mes objectifs, c’est de gérer mon Master à la Sorbonne l’année prochaine. Dans l’idéal, ce que j’aimerais c’est continuer dans l’illustration. J’ai plein de petits projets de livres qui sont soit finis, en cours ou en réflexion. Et j’aimerais beaucoup continuer à peindre. Je voudrais faire des toiles immenses. Pouvoir être illustratrice et peintre.
Tu voudrais voyager ? Vivre ailleurs peut être ?
Je voudrais pouvoir vivre au moins un an de ma vie en Martinique – là où il y a une partie de ma famille. C’est un endroit où je ne suis pas beaucoup allée mais que j’adore. J’apprends l’Hindi aussi, ce serait bien que ça serve quand même.
C’était comment Estienne ?
J’ai adoré Estienne, surtout pour ma classe. J’ai rencontré des gens qui restent encore parmi mes meilleurs amis. J’ai fait des projets géniaux. J’ai vraiment pu développer au max les thèmes que je voulais aborder. J’ai eu certains profs qui m’ont beaucoup aidé et qui m’ont encouragé.
Et la FAC c’est comment ?
Ce que je trouve bien avec la FAC c’est le côté très diversifié et ouvert, ça nous donne plus de liberté. Ce que j’ai le plus aimé c’est l’autonomie. Il y a pleins de cours différents, des cours très spécifiques. On est souvent face à des gens qui ont un sujet et qui sont vraiment à fond dedans et je trouve ça très intéressant. Par exemple, à la FAC, j’ai eu des cours d’anthropologie de l’art, plus précisément sur la réception et le traitement de « l’art en Afrique » par l’Europe. Ou un cours de médiation culturelle sur les théories féministes et décoloniales. J’ai l’impression que ça donne de la place pour des conversations plus militantes et critiques sur le monde de l’art.
Quels sont les artistes qui t’influencent ?
Je voue un culte à David B… Je me suis offert l’intégral de « l’Ascension du Haut Mal ». C’est une BD sur son enfance. Son grand frère est autiste et il raconte sa vision de la maladie, comment ils grandissent avec, leur famille etc. Je l’ai découvert en DMA, quand je cherchais des références pour mon diplôme, en BD ou romans graphiques sur des histoires de famille. J’étais subjuguée parce que c’est tout ce que j’aime au niveau de l’illustration.
Je suis forcément très inspirée par l’illustration…donc David B ou Marjanne Satrapi. En peinture j’admire beaucoup Chéri Samba (pour les métaphores) ou Frida Khalo. Il y a pas mal de graveurs sud-américains que j’aime bien : Gilvan Samico, J. Borges… Faith Ringgold aussi est une artiste qui a fait des livres pour enfants que j’aime beaucoup.
Les romans font aussi partie de mes plus grosses influences. J’aime bien les gros récits familiaux. « 100 ans de Solitude » [Gabriel García Márquez], c’est mon livre préféré. Il y a aussi « Debout sur la Terre » de Nahal Tajadod. C’est une histoire de destins croisés. Arundhati Roy, je l’adore aussi. Elle a écrit « Le Dieu des Petits Riens » et « Le Ministère du Bonheur Suprême ». Quand je l’ai fini, je me suis dit que je lirais plus jamais de livres, c’était trop beau. J’aime beaucoup les écritures très imagées. Dans cette veine-là, il y a aussi Haruki Murakami avec « Kafka sur le Rivage » et « Chroniques de l’Oiseau à Ressort ».
Pour le cinéma, je regarde beaucoup de films Bollywoodiens. Surtout ceux des années 90. J’aime aussi énormément les films de Youssef Chahine. Il a fait une comédie musicale qui s’appelle : « le Retour de l’enfant prodigue ». Il a un côté drame classique mais toujours sur fond politique.
Pourquoi tu fais des études d’art ?
A la base je voulais faire du théâtre et/ou du social. Mais quand j’ai déménagé, dans le lycée où j’étais il y avait une section arts appliqués, j’aimais bien dessiner et mes parents m’ont poussés vers ça pour que je fasse pas L. Je suis rentrée en pensant devenir scénographe pour le théâtre. Et finalement je déteste le design d’espace et je préfère dessiner.
Un mot pour la fin ?
Mon mot de la fin c’est : « travaillez avec les Trois Têtes et soutenez-les parce qu’ils sont géniaux ». Ça a été un grand plaisir de travailler avec vous.
Merci Léna !

Léna photographiée par Asako Yamasaki à la gare d’Ivry-sur-Seine